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La liberté

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Message par Flora Jeu 14 Avr - 1:44

Lao-Tseu (VIème-Vème avant JC) : « Recherchez la liberté et vous deviendrez esclave de vos désirs. Cherchez la discipline et vous trouverez la liberté. »

→ La liberté présuppose l'obéissance à la règle. Être libre, c'est le mouvement par lequel la règle nous émancipe. Il n'y a pas de liberté dans le dérèglement, et ce qui est par nature déréglé est le désir. Si on cherche la liberté, spontanément on tendra à nier l'exigence de la contrainte ; et si on nie l'exigence de la contrainte on devient esclave de la conscience désirante, de la contradiction du désir qui est la plus grande contrainte. En voulant à toute force se libérer, il est bien possible que l'on s'aliène. L'expression de la liberté commence dans la négation de la règle, mais il ne faut pas s'arrêter à cette première expérience au risque de devenir esclave de la contradiction. C'est en se conformant à ce qui est apparemment le plus éloigné de la liberté (la discipline) que l'on finit par la trouver. On n'est libre que lorsqu'on « se réalise ». Se réaliser, c'est faire sortir de nous ce qui était seulement possible, rendre actuel ce qui en nous n'était que virtuel ; c'est devenir ce que l'on est. C'est faire passer à l'acte sa puissance (au sens de potentiel). C'est la contrainte qui permet ce passage à l'acte. Le moteur de cette actualisation est peut-être la volonté. La liberté dont il parle est celle qui naît de la discipline et de l'organisation. Pour lui, il n'y a pas de différence entre être libre et avoir une forme, être là. La liberté n'est que l'épanouissement de nos capacités, car c'est cet épanouissement qui fait que notre vie peut avoir un sens. « La liberté du vide (= négation de la contrainte) n'est qu'un vide de liberté » (Hegel) parce qu'elle n'a pas de contenu. Seule la contrainte permet que nos actes soient finalisés et aient un sens. Aristote : « La nature a horreur du vide ». Être libre, c'est assumer la contrainte en cela qu'elle forme et informe notre comportement et infuse sémantiquement nos actes. Deux phases : comprendre sa puissance → l'authentifier.
Comment la liberté peut-elle s'accommoder des règles ?

En grec, liberté = ελευθερια
Pour les grecs, la liberté ne constitue pas un problème, c'est pourquoi elle n'apparaît pas dans les dialogues socratiques. Les choses ne deviennent des problèmes que lorsqu'on ne croit plus en elles.
Eleutheria est une déesse et pas un problème.

Croire/Savoir
On insiste souvent sur le fait qu'il y a des choses auxquelles on croit sans que cela soit fondé sur un savoir rationnel (ex : astrologie). Mais on insiste beaucoup moins sur le fait qu'il y a des choses que l'on sait mais auxquelles on ne croit pas (ex : mort). La liberté est devenue un problème lorsque l'on a cessé d'y croire. La réconciliation du savoir et du croire consiste en la méditation.

C'est à partir de Galilée et de la science moderne que la liberté devient un problème. Le sentiment de la liberté, pour les matérialistes, n'est que l'ignorance des causes qui nous déterminent.

Aristote, Politique : « L'esclave est celui qui par nature n'a pas vocation à s'émanciper ».

Contrainte → Barreau de la prison → aliénation
→ Barreau de l'échelle → émancipation



LA QUESTION EXISTENTIELLE DE LA LIBERTE

Si être libre, c'est effectuer des choix volontaires, alors comment peut-on parler de liberté alors que notre présence est frappée du sceau de l'involontaire ? Du point de vue de celui qui naît, une grossesse est toujours non désirée. Notre vie n'est pas sous l'empire de notre volonté. On naît toujours par accident. La vie s'impose à nous d'une manière telle qu'elle est dès le départ une négation de la liberté. Notre vie est frappée par le spectre de l'accidentel. Notre expérience première de la présence est une expérience de la dépossession et donc peut-être une forme d'aliénation. Au bout d'un moment, on peut décider de ne plus vivre : le suicide est une tentative d'appropriation de ce qui ne peut pas être approprié. Schopenhauer : « Tout suicide n'est qu'un hommage posthume à la vie ». Que peut bien signifier l'idée de liberté pour un être qui ne choisit pas d'être ? Être, c'est par définition être livré à des regards sur lesquels on n'a aucun contrôle (→ Borella). Tout le monde peut nous voir, sauf nous-mêmes. Être, c'est ne pas être à soi. Nos parents savent avant nous comment nous nous appellerons. D'autres savent avant nous qui nous sommes. Nos parents sont pour nous une « mémoire prophétique ». Notre identité n'est pas d'abord la nôtre. Avec chaque individu,tout recommence, mais rien ne commence. Il y a une raison au désespoir : on advient à l'être sans l'avoir choisi et tout dans notre vie semble confirmer cette expérience de la dépossession. Ancien Testament, Job, 3, 11-12 : « Pourquoi ne suis-je pas mort dans le ventre de ma mère ? ». Cioran, De l'inconvénient d'être né : « Pourquoi tout cela ? Parce que je suis né. Que faites-vous du matin au soir ? Je me subis. » ; « Si on pouvait interviewer une vague, elle vous dirait qu'elle va quelque part ». L'idée de liberté est un cache-misère, un moyen lamentable de se consoler alors que tout dans notre expérience la contredit. La vie s'impose, on ne peut pas d'abord la refuser.
Être, c'est être aliéné, par définition.

On ne souffrirait de rien si on n'avait pas toujours conscience de la possibilité d'un bonheur. Tout le monde a cette conscience, car tout le monde souffre. L'exigence de la liberté s'impose à nous en même temps que l'expérience de la dépossession. Tout homme est un Ulysse. L'expérience du désespoir est l'authentification par la négative de l'espoir de l'Homme et de l'exigence de liberté et de bonheur. On ne souffrirait pas du caractère insensé de la vie si on ne s'attendait pas toujours à ce qu'elle ait un sens. L'épreuve de la privation de sens est l'authentification de la présence de sens.
Il y a deux remèdes à l'expérience de la séparation originelle : le logos et l'amour. Aristote, De anima : « Car ce n'est pas en lui-même mais semblable à lui-même que l'homme communie à l'éternel et au divin ». Ce qui nous sauve de l'empire de la génération et de la corruption, c'est l'engendrement. C'est par la médiation d'autrui que l'identification redevient possible. Personne ne semble propriétaire de rien, car on transmet la dépossession.



QUE SIGNIFIE CONCEVOIR RATIONNELLEMENT LA LIBERTE ?

Platon, Gorgias

La liberté telle qu'elle est définie par Calliclès est la négation unilatérale de toute forme de contrainte, le pouvoir de laisser libre cours au déchaînement du désir. La liberté est le privilège de l'homme viril et de l'aristocrate. C'est cette conception qui est le fantasme le plus naturel de la conscience. Mais ce qu'il appelle licence n'est elle-même que l'obéissance à des déterminations naturelles, à la face passive du désir. Calliclès dit en quelque sore qu'être libre, c'est suivre l'immanence. L'homme n'est libre que soumis à ses pulsions. Calliclès s'éclate.
Socrate dit que se contrôler, c'est savoir domestiquer la nature en soi. L'Homme sage est celui qui sait faire de sa pulsion une raison d'agir. L'Homme est le premier animal domestique. Être sage, c'est pouvoir différer la satisfaction des désirs. L'insulte de Calliclès montre qu'il cède à son désir.
L'homme libre, par opposition à l'esclave, est celui qui s'affranchit de toute forme de contrainte et peut débrider sa passion. « Vive selon la nature » peut vouloir dire tout et son contraire:
pour les stoïciens : vivre selon le logos, la raison
pour Calliclès : vivre en suivant les impulsions de la matière (→ irrationalité)
pour Diogène le cynique : vivre selon l'innocence de ce qui est premier.
La nature constitue toujours un idéal : pour Calliclès, c'est « beau et juste » et donc ce que l'on peut espérer de mieux. Pour lui, il faut mettre la pensée au service du désir : le ventre commande à la tête. C'est une thèse élitiste et hédoniste. Mais pourquoi cette thèse apparaît-elle comme choquante? Calliclès répond que c'est pare que les hommes sont des lâches : parce qu'ils n'ont pas les moyens d'assouvir leurs désirs, ils sont secrètement jaloux de ceux qui en ont les moyens. Il n'y a de liberté que tyrannique et tous ceux qui disent le contraire sont des frustrés. Calliclès recherche une liberté dionysiaque, c'est-à-dire enivrant et déréglée. L'idée de liberté dans l'éclatement est soutendue par une volonté d'identification. Ce qui caractérise Calliclès, c'est une impuissance à choisir : l'aboulie (= impuissance de la volonté).
Pour Calliclès, la liberté est par essence antidémocratique ; elle n'a pas vocation à être étendue au plus grand nombre. C'est une prérogative réservée à une élite (soit naturelle, soit acquise par le talent). C'est un liberté jalouse. L'idée post-moderne de la liberté est l'idéal de Calliclès pour lui, quoi de plus naturel que de favoriser ses amis si l'on en a le pouvoir. Calliclès fera toujours primer le particulier sur l'universel. Rien n'est plus légitime que l'autorité tyrannique. Calliclès identifie le bon pour lui au Bien universel, au libre et au juste.

Critique de la position de Calliclès :
→ Le bonheur auquel il aspire est ce que Hegel appelle la liberté du vide, qui n'est qu'un vide de liberté. C'est la liberté au sens de la chute libre: plus rien n'oppose de résistance. Mais lorsque plus rien n'oppose de résistance, c'est la réalité même qui disparaît. Cette liberté se traduit donc inévitablement dans le fantasme et l'imagination, dans le délire incapable reconnaître le sens des choses. C'est la négation apollinienne de l'exigence de cohérence de la vie. Cocteau, Alors apparurent : « Et comme ils tomberont, ils croiront qu'ils volent / Et peu importe qu'ils visitent les mondes / Car les mondes ne voudront plus d'eux ». Calliclès est voué à rencontrer le sol, c'est-à-dire à rencontrer plus fort que lui. Selon la loi du plus fort, il y a toujours un plus fort.


Weil, Réflexions sur les causes de la liberté et de l'oppression sociale

« Véritable » est à entendre ici au sens d'authentique. Pour Simone Weil, la liberté correspond au couple penser/agir, qu'elle oppose au couple désirer/jouir dans lequel prime la passivité car dans l'expérience du désir nous ne sommes pas maître de nous-mêmes. Or la liberté est une activité. Hegel, Encyclopédie des sciences philosophiques : « L'esprit est l'activité pure ». Le moyen terme entre la pensée et l'action est la volonté. Il n'y a pas de liberté authentique que dans l'exercice de la volonté (= puissance par laquelle nous rendons la pensée manifeste). Une action qui n'est pas suscitée par un jugement rationnel n'est pas une action au sens strict. La pensée délibère d'abord sur le but d l'action : Que faut-il faire ? Elle délibère ensuite sur les moyens de l'atteindre : Comment faut-il faire ? Le seul homme libre, c'est celui qui pense à tout ce qu'il fat. Mais est-ce qu'on pourrait encre agir si tous nos fait et gestes étaient subordonnés à l'entendement ? L'émotion est un facteur déterminant dans le processus de décision. Choisir, bien souvent, c'est parier.
Au sens littéral, la thèse d Simon Weil est incroyable : on peut être libre dans un existence qui ne serait qu'échec. C'est une perspective antipragamatique : ce qui compte, c'est l'effort qu'on fait pou extérioriser notre jugement, et pas le résultat de cet effort. Ce n'est jamais le succès de l'action qui authentifie la faculté d'agir, mais on est libre tant qu'on en dispose. L'essence de l'action n'est pas de réussir. La liberté tient dans l'intention. C'est une positon très abstraite. La liberté pesée par Simone Weil est outrageusement idéaliste et abstraite parce qu'elle ne fait aucun droit à effectivité des actes.


Sartre, L'existentialisme est un humanisme

Le choix, alors même qu'il me singularise, n'engage jamais que moi-même. Il y a toujours chez l'être humain une corrélation entre être et devoir-être, et l'homme ne se contente jamais d'être : en étant, il s'efforce de donner un exemple. Notre choix présuppose toujours un idéal, c'est-à-dire un modèle qui vocation à s'imposer à tout le monde. Agir, c'est présupposer une nécessité universelle du Bien. Toute action humaine serait en même temps l'image d'un symbole que, sans y penser, nous proposerions aux autres. Le sadique, en voulant produire le Bien, se trompe de chemin et ne recherche que son propre bonheur. Tous les hommes sont-ils également conscients de la juste définition du Bien? Sartre veut dire que l'on peut se tromper sur la définition du Bien, mais on ne peut pas ne pas le vouloir et ne pas le chercher. Si l'individu est rationnel, il comprendra que son bien à lui ne peut pas s'effectuer à l'exception des autres, sinon les autres le détruiront car tout rapport a naturellement vocation à s'inverser. Un acte libre n'a jamais une valeur isolée, il vaut toujours pour plusieurs car nos actions ont toujours une valeur symbolique et ont vocation à l'universalité. L'action libre est l'action dont on est responsable (responsabilité = reconnaissance objective de l'acte, reconnaissance subjective et reconnaissance universelle). C'est l'acte héroïque qui est le modèle même de l'acte libre. Tout le monde s'identifie au héros. Concevoir rationnellement la liberté, c'est concevoir un caractère universel des actes, penser qu'il n'y a aucun être sans devoir-être. L'acte héroïque n'est pas réfléchi, il est réflexe et habituel. L'habitude est la volonté devenue réflexe et instinct. Le héros est celui qui a pris l'habitude d'agir bien. L'acte héroïque est le contraire de l'acte acédique.


Kant, Qu'est-ce que s'orienter dans la pensée ?

L'idée que l'on ne peut pas ôter à quelqu'un sa liberté de penser était déjà un lieu commun au XVIIIème siècle. Dans « contrainte civile », il y a aussi l'idée de force, et pas seulement de droit. Une puissance coercitive telle que la police peut nous prendre tous nos droits. Max Weber : « Un État est une instance qui a le monopole de la violence légitime ». Kant reprend ici la définition socratique de la pensée avec une structure dialogique. La pensée présuppose l'intersubjectivité. δια­λογος : le logos traversant qui nous permet de franchir l'abîme entre nous-mêmes et autrui. Si la pensée est dialogue, elle ne peut se faire que par rapport à une relation. Elle obéit à une logique ternaire naturelle : position, opposition, superposition. La pensée qui n'est pas exprimée n'a pas de densité ontologique. Ce qui réalise la pensée, c'est l'épreuve de l'extériorisation. La pensée est du dynamique qui nous fait passer du plus intérieur de nous-mêmes au plus extérieur à travers l'expression verbale. Lorsque nous communiquons, nous n'utilisons pas le logos comme le véhicule du sens : il en est l'opérateur, c'est-à-dire le principe qui réalise vraiment la chose. La pensée à une dimension vocative. Derrière « dire que », il y a toujours « dire à ». On ne peut donc pas penser tout seul. Si on prive quelqu'un d'interlocuteur, on lui ôtera la capacité de penser. L'isolement n'est donc pas que la privation des moyens de communication, il est aussi l'extinction annoncé de la puissance de la pensée.
La « contrainte morale » est représentée par la figure du prêtre. C'est une contrainte exercée directement sur l'esprit. Kant (protestant) met ici en question la légitimité des directeurs de conscience et l'idée même que l'on peut avoir des maîtres à penser. Il critique le papisme et dit qu'il n'y a pas besoin de la médiation de la prêtrise : c'est une quête personnelle.
La liberté n'est pas la négation de la loi, car sans loi on ne produit que de l'absurdité. La loi n'est pas négatrice de la liberté, si elle est un effet du travail rationnel. Se donner à soi-même une loi, c'est être autonome.
On ne peut pas penser la liberté dans l'intention pure : il faut la penser dans l'action. Une liberté dont on ne fait rien n'est pas une liberté. Kant permet de penser une position moyenne entre l'idéalisme abstrait de Simone Weil et la passion de l'effectivité de Calliclès.


Hegel, La raison dans l'histoire

Ce texte marque une opposition nature/culture forte. Pou Hegel, la liberté humaine est un effet culturel. Ce n'est pas un don Moïra, c'est une conquête, une ligne de conduite. C'est l'apprentissage de la connaissance et de la discipline de la volonté que la liberté s'acquiert. Elle n'est pas cette puissance par laquelle nous sommes capable de nous rebeller, mais par laquelle nous apprenons à obéir à des contraintes et à comprendre leur sens.
La nature au sens hegelien est ce qui est incapable de surmonter sa propre contradiction. La loi de la nature, qui est la loi du plus fort, est la loi même de la contradiction car elle dit qu'il n'y a pas d'unité et qu'en fait il n'y aura jamais de loi.
Pour lui, il y a un moment de nature dans la culture, à travers les passions : jalousie, désir de vengeance,... Le moment naturel est surmonté par l'Homme grâce à des structures institutionnelles qui régulent les passions : la famille (= unité de sang et unité d'intérêt, unité régulatrice de la vie de l'individu), la société civile (= conflit d'intérêt et conflit familial) et l'État (= communauté d'intérêt qui se construit malgré les différences de sang). Ce dernier est pour Hegel le degré ultime de la réconciliation qui permet de surmonter toutes les contradictions.
La liberté ne se réalise que dans le droit (→ État) et dans les mœurs (= us et coutumes, comportements typiques qui sont autant de limitations (ex : personne ne met de rideaux aux fenêtres aux Pays-Bas), → société). Le droit est l'extériorisation ultime de la Raison dans le domaine de la liberté. C'est la loi qui donne des droits : c'est l'interdit du vol qui permet la liberté de propriété. Quand elle est rationnelle, la liberté est rendue effective par la loi, le droit, qui produit un ensemble cohérent garantissant l'épanouissement de l'individu dans la société.
La liberté ne devient effective que dans la meure où elle est encadrée par un droit. Concevoir rationnellement la liberté, c'est concevoir et produire un code civil, un système juridique.



LE PROBLEME DU DETERMINISME

Les choses ne deviennent des problèmes que lorsqu'on cesse d'y croire. On a cessé de croire en la liberté parce que s'est constitué un savoir scientifique moderne incroyable. Pour la physique, tout n'est que dispersion moléculaire hasardeuse. Pour la sociologie, l'individu est l'effet d'un groupe. Pour la psychanalyse, l'individu est l'effet d'un inconscient. Pour le behaviorisme, l'individu est l'effet de stimulations externes. Pour l'anthropologie, l'individu est l'effet d'une culture. Pour la génétique, l'individu est un héritage biologiquement déterminé. Toutes ces sciences sont déterministes et disent que l'individu n'est que l'effet consécutif de causes qui le précèdent et qui lui sont extérieures. Mais en aucun cas il n'y a de réalité qui soit sa propre cause, il n'y a de cause qui ne soit pas effet. Qu'en est-il de l'Homme ? Son sentiment de liberté (au sens kantien) n'est qu'une illusion. Comme le dit Spinoza, l'humanité n'est pas un empire dans un empire, mais est déterminé. L'Homme ne croit plus en la liberté car tout ce qu'il sait l'incite à penser qu'elle n'existe pas.
La disjonction entre savoir et croire plonge l'Homme dans l'inquiétude. Qui peut vivre en pensant qu'il n'est qu'une outre ?
Dire « demain, je ferai », c'est croire que nous sommes cause et non effet. La litanie du désespoir : l'Homme est un effet lorsqu'il est cause, il n'est que relativement cause. C'est l'enjeu de la science moderne : quel est le modèle déterministe ?
L'Homme est prisonnier de vérités sans signification (sciences expérimentales : loi des probabilités). D'un autre côté, il y a des significations sans vérité (sciences humaines).
Le déchirement de la conscience occidentale entre des vérités sans signification et des significations sans vérité, c'est la science qui nie notre prétention à la vérité. Là où règne l'art de l'interprétation, c'est dans les sciences humaines : elles n'ont pas d'objectivité. Dans les sciences expérimentales, la catégorie directrice est la preuve.

Spinoza, Éthique

Spinoza est un philosophe hollandais de la fin du XVIIème siècle, qui s'inscrit dans la tradition juive. L'Ethique est un système complet de métaphysique. Toute réalité signifiante répond à une démonstration unique. L'intention de Spinoza est de faire la démonstration de la réalité, soumettre la philosophie aux exigences mathématiques. Tout comme Hume, Locke, Kant, il a voulu être le « Newton de la philosophie ».
Il y a un certain type d'expérience qui doit nous amener à considérer que nous ne sommes pas libres : l'expérience du repentir nous montre qu'il y a de bonnes raisons de douter de l'effectivité du libre-arbitre. Pour Spinoza, notre volonté est faible. La faiblesse de la volonté, c'est l'expérience de l'acrasie (ou aboulie) qui est bien souvent suivie par l'expérience du repentir. Exemple : la procrastination. Qui agit dans le petit enfant ? La pulsion de faim, universelle. Ce sont des passions : la faim, la colère, la peur,... Spinoza dit que derrière l'apparence de l'action, il y a toujours un mobile qui n'appartient pas à l'individu, c'est-à-dire une passion. En l'Homme, il s'agit (=quelque chose agit). L'Homme est agi bien plus qu'il n'agit. L'action, lorsque le logos la rend transparente, cache une passion impersonnelle.
C'est l'ivresse qui désinhibe, qui rend transparent, au sens où le coeur est mis à nu, où son animalité pulsionnelle apparaît. L'Homme ivre croit se délivrer. Cette mise à nu apparaît rétrospectivement comme un viol, et après l'ivresse on le regrette. L'ivresse du bavardage est ce qui authentifie l'acrasie chez l'Homme, c'est-à-dire le manque de liberté humaine. Pour Spinoza, il s'agit toujours, mais je n'agis jamais. Pourquoi se croit-on libre ? -> Car nous ignorons les causes qui nous déterminent. La liberté est un rêve éveillé. Spinoza rejoint ici la vision d'Héraclite. Tant que nous croyons être libre, nous sommes un dormeur du monde. Pour lui, il n'y a de liberté authentique que dans la prise de conscience de la non-liberté radicale de l'Homme. Est libre celui qui sait qu'il ne l'est pas.
La thèse de Spinoza est la suivante : il y a bien une liberté humaine, mais qui n'est au fond qu'une prise de conscience. Plus la connaissance prend le pas sur l'ignorance, plus notre liberté décroît. La plus grande ignorance est celle qui croit qu'elle est connaissance.


Laplace, Le démon de Laplace, Essai philosophique sur les probabilités

Laplace est un philosophe du XIXème siècle. Il a repris un principe appelé le principe du rasoir : « Il ne faut pas multiplier les entités sans nécessités ».
Dans ce texte, Laplace fait une expérience de pensée. L'hypothèse déterministe posée ici exprime l'idée que chaque moment de l'univers n'es-t que la conséquence nécessaire de tout ce qui est advenu et la cause de tout ce qui adviendra. L'expérience de pensée consiste à imaginer l'intelligence (dont l'archétype est l'être humain) qui ne serait pas limitée dans le temps ou l'espace. Nul ne peut rompre les chaînes de la causalité. Celui qui comprendrait réellement le présent comprendrait tout (-> Janus). Ce qui est libre suggère de l'inachèvement. Il faut que tout ne soit pas hasardeux ou nécessaire sinon il n'y a pas de liberté. La liberté n'a de sens que dans la médiation entre les deux.
Pour Laplace, l'esprit humain s'approche d'un tel état qui est en fait un anti-état, car l'esprit s'abolirait et il n'y aurait plus de conscience car la réflexivité présuppose une limitation. La science a toujours vocation à produire des lois. La loi permet la prévision et donc donne du pouvoir. La connaissance est une lumière qui déplace les champs d'ombre. Une lumière totale consumerait ; l'ombre est toujours persistante.


D'Holbach, Système de la nature
Il défend un matérialisme déterministe très caricatural. L'humanité n'est qu'un agrégat de particules. Nature est ici non pas la physis d'Aristote mais la nature de Galilée. La nature est un code où il n'y a aucun hasard, où tout fait sens d'un point de vue causal. La vie se fiat en nous, sans nous (= sans notre consentement). L'humanité ne s'énonce pas au présent, mais à l'imparfait dans une subordonnée.
Si cette thèse est vraie, elle doit pouvoir expliquer le changement. Dans la vie, on peut jouer les passions contre les passions. L'Homme qui change de comportement a seulement troqué une passion pour une autre. Le choix n'est pas une preuve de liberté, mais la prise de conscience qu'il yu a conflit des passions. Le choix est toujours conditionné. Choisir, c'est êytre emporté par le courant le plus fort. Le caractère d'un individu a une détermination innée. Le système de liberté dont parle D'Holbach est le système de droit. Derrière le droit (= usage codifié de la liberté), il n'y a que la nécessité. Toutes les tentatives pour discipliner le comportement humain sont la rationalisation des passions. D'Holbach, comme tous les autres philosophes du XVIIIème siècle, pense être le Newton de la morale. Le nécessaire est ce double contraire et impossible. La nécessité régit tous les registres du réel.


Sartre, L'Être et le Néant

Ce texte est en deux parties : présentation puis réfutation du déterminisme. Sartre commence par rappeler que le déterminisme envisage l'existence humaine en tant qu'elle est toujours l'effet d'autre chose qu'elle-même/ Le désir de métamorphose qui caractérise l'individu est toujours un désir vain. L'attitude que produit le déterminisme est au mieux le consentement et au pire la résignation. L'homme est toujours pris dans un complexe causal qui le définit : causalité physique ou génétique, causalité sociale, causalité psychologique ou affective (→ famille). Toute vie n'est d'abord qu'un fardeau. Nous ne sommes jamais rien d'autre qu'un résultat. L'individu humain est toujours un héritier. Le déterminisme social paraît être tout à fait indiscutable. Il existe d'autres déterminations : la religion, par exemple. Le désir d'émancipation de l'individu est toujours vain ; le déterminisme ne peut que décevoir l'individu, il nie l'originalité (à tous les sens du terme) de l'Homme. Mais dans ce cas, pourquoi l'Homme se croit-il non déterminé ? Un déterministe dirait que l'existence humaine est une aberration nécessaire. Par « coefficient d'adversité », Sartre veut dire que nous ne rencontrons le monde que dans une situation où il nie notre volonté. Toute relation avec l'environnement spatio-temporel est d'abord une relation de résistance. Le monde conspire en permanence pour faire échouer l'Homme. Si celui-ci essaie de la transformer, il sera victime du destin. Du point de vue déterministe, quand on nie la détermination, on la confirme. Nous sommes le résultat involontaire de choses qui nous entourent, nous précèdent et nous dominent.
Sartre se fait le porte-parole d'une tradition qui ne s'est jamais inquiétée des arguments déterministes en citant le Discours de la méthode de Descartes. Celui-ci dit aussi : « Il faut changer ses désires plutôt que l'ordre du monde ». C'est une maxime prudentielle d'inspiration stoïcienne. Le monde a quelque chose d'implacable, de complètement déterminé, mais on peut transformer infiniment ses désirs. On peut donc être un relatif déterministe. Mais cet argument ne suffit pas à réfuter totalement le déterminisme, et Sartre va plus loin. Si le monde peut nous décevoir et sembler nous mettre en échec, c'est parce que nous en attendons quelque chose, parce que nous sommes capables de nous figurer une fin qui devrait régler notre comportement. Nous devrions pouvoir modifier nos attentes afin de transformer notre perception du réel. Les chaînes de la nécessité ne sont inflexibles que pour celui qui attend quelque chose du monde en réalité, selon Sartre, celui-ci n'est pas contraignant mais neutre. La caractère adjuvant ou opposant d'une chose ne dépend que de ce que nous voulons en faire. Le monde n'est que la matière première de notre identification, il est ce que nous sommes capables d'imaginer. En soi, le monde n'a pas de sens. Le déterminisme est une manière parmi d'autres de finaliser l'expérience. De ce point de vue-là, le déterminisme prétend indûment à l'universalité. Les phénomènes n'ont jamais de sens considérés isolément ; ils n'en n'ont qu'insérés dans un complexe sémantique, un réseau de sens qui en finalise l'usage. L'idée que le monde ne cesse de nous décevoir ne peut se faire que si nous avons la liberté de concevoir le monde tel que nous voudrions qu'il soit. Si nous n'avions pas cette liberté fondatrice et fondamentale d'attendre quelque chose, nous serions toujours satisfait.
Pour aller plus lins que Sartre, on dira que la pensé »e est par essence libre car la conscience est réflexive.



CONCLUSION

Depuis le XVIIème siècle s'est développée une science incroyable basée sur le déterminisme et le matérialisme, qui nous fait apparaître comme des héritiers et non des conquérants. Cette science nie la réflexivité de la conscience et la singularité de cette réflexivité. C'est ce qui est par essence hors de contrainte. Nous sommes donc libres, puisque nous sommes conscients on peut développer une science qui fasse abstraction de ce fait : le béhaviorisme, la sociologie,... Seulement lorsque l'on fait cela on produit des sciences incroyables et fort peu scientifiques. La liberté est un fait que l'on confirme lorsqu'on le nie. « L'esprit, comme le dit Hegel, est un acte de pure liberté ». Le déterminisme est moins une science qu'un credo. La réflexivité de la conscience peut espérer être réglée, se discipliner elle-même pour accéder à l'authentique liberté. La liberté non disciplinée n'est que la chaos. Dans quel sens doit-on discipliner la liberté ? → Vers le Vrai (exigence intellectuelle), le Bien (exigence morale) et le beau (exigence sensible). La question de la liberté humaine ne se pose que dans le cadre d'un processus qui est l'existence ; c'est un chemin, une dynamique. La liberté n'est pas un problème ni une fin ; elle esr un point de départ.
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